Ce qu'on entend encore à table...
- Karin Warin
- 8 oct.
- 3 min de lecture
“J’ai cessé de faire des concessions sur mes convictions”
> Révéler le sexisme ordinaire qui, quoi qu’on en dise, perdure.
— Mercedes Erra, Capital, mars 2024

1. Quand la conviction devient une frontière
« J’ai cessé de faire des concessions sur mes convictions. »
Cette phrase de Mercedes Erra agit comme un seuil.
Elle trace une ligne entre ce que l’on pense et ce que l’on tolère.
Elle oblige à la cohérence.
Depuis trente ans, Mercedes Erra incarne cette exigence dans un univers souvent perçu comme superficiel : la publicité. Cofondatrice de BETC, agence aujourd’hui la plus créative du monde, elle s’est donnée pour mission d’exposer le sexisme ordinaire et de questionner les réflexes qui le nourrissent. Elle le répète : l’égalité reste un combat inachevé.
2. Les campagnes qui réveillent les consciences
La communication peut être un levier d’action.
La campagne SISTA, menée par Mercedes Erra, le prouve : des hommes de pouvoir y répondent à des questions réservées d’ordinaire aux femmes. Leur gêne suffit à révéler le déséquilibre.
Pour le Haut Conseil à l’Égalité, elle a mis en lumière le traitement médiatique des dirigeantes : leur ton est jugé, leurs émotions surinterprétées, leur ambition transformée en “excès”. Ces campagnes ne cherchent pas à séduire, elles visent à rendre visible ce que tout le monde croyait normal.
3. Ce qu’on entend encore à table
Hier, lors d’un déjeuner d’entrepreneurs, j’ai cité une femme politique que je trouve brillante.
Un homme à ma gauche a réagi :
> « Elle est mignonne, mais qu’est-ce qu’elle est conne. »
Un autre a ajouté :
« Les médias les rendent hystériques, c’est pour ça qu’on les supporte mal. »
Ce genre de phrase est révélateur.
On y mélange apparence, intelligence et jugement moral dans un même souffle.
Mercedes Erra dit que ce sexisme-là ne se voit plus, car il s’est fondu dans la conversation. Il ne choque plus. Il existe dans la légèreté d’un mot qui blesse sans bruit.
4. L’utilité des réseaux féminins
Certains regardent les réseaux comme Femmes&Challenges, où Mercedes Erra fut invitée en 2020, comme des cercles fermés. En réalité, ces espaces sont devenus des tremplins. Ils permettent aux femmes de parler, de confronter leurs expériences, d’affûter leurs arguments.
Ces communautés ne se contentent pas de partager des valeurs ; elles transmettent des outils et entretiennent l’énergie nécessaire pour agir dans des environnements encore inégaux.
5. Refuser de s’ajuster à l’injustice
Cesser de faire des concessions, c’est refuser de s’ajuster à l’injustice.
C’est rester fidèle à ses repères même quand l’environnement pousse à la diplomatie.
Mercedes Erra a vécu cette tension : au lancement de BETC, elle découvre qu’elle est moins payée que ses associés masculins. Elle ne s’est pas retirée. Elle a prouvé que la créativité n’a pas de genre et que la performance peut cohabiter avec la conviction.
6. Ce que cela exige de chacun
Ne plus faire de concessions impose une vigilance quotidienne :
relever les phrases qui dérapent,
refuser le rire complice,
nommer les stéréotypes quand ils se glissent dans une discussion,
soutenir les voix qui osent.
Chaque fois qu’on laisse passer une phrase sexiste, on entretient le terrain sur lequel elle pousse.
7. L’héritage de cette phrase
« J’ai cessé de faire des concessions sur mes convictions » n’est pas un slogan, c’est une méthode.
Elle appelle à la clarté, à la cohérence et au courage.
Elle invite à défendre son point de vue sans s’excuser.
Elle incarne la lucidité tranquille d’une femme qui agit depuis trente ans sans perdre de vue le cap : transformer les imaginaires.
Alors d'après j'ai répondu quoi à cet homme à table ?




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